J’embauche !

manager une tpe

18 – En voilà un sujet un peu délicat pour un dirigeant : les salariés !

Certains d’entre nous, dirigeants de TPE, ont décidé de travailler seul, par choix, ou pour ne pas avoir à s’embêter avec des salariés osent même le dire certains. Et vous êtes plus d’un million de dirigeants de TPE à ne pas avoir de salariés, hors auto-entrepreneurs.

Pourtant, travailler en équipe avec d’autres, même diriger, est assez enthousiasmant de mon point de vue. Fédérer des énergies pour construire une entreprise, un projet, des réalisations, et ceci à plusieurs est quand même autrement plus intéressant, d’un point de vue humain.

Mais voilà, on ne s’improvise pas patron. Il existe bien sûr des écoles de management, mais trop souvent adaptée aux PME voire aux grandes entreprises où la hiérarchie est bien établie et en place depuis longtemps.

En fait, je ne suis pas sûr que la psychologie, l’empathie, l’intelligence émotionnelle s’enseignent dans ces écoles. En réalité, le dirigeant,en particulier de TPE, apprend sur le tas, à bien se comporter, à obtenir le meilleur de ses collaborateurs, à créer une dynamique positive au sein de son entreprise. Car c’est de cela dont on parle ! Un dirigeant, au delà de son objectif final de développer son chiffre d’affaires, doit créer une atmosphère propice à la création de valeur en favorisant un climat de travail agréable.

Sans céder aux injonctions actuelles du bonheur au travail, la qualité du travail fourni, le rendement des salariés, et leur implication dépend largement du comportement du chef d’entreprise. Quel dirigeant n’a pas vécu ces situations où le sort de la journée dépend du sourire et de l’accueil du dirigeant à l’arrivée des salariés le matin ?

Pour autant, il n’est malheureusement pas rare dans des TPE, de voir des patrons se comporter comme des petits tyrans provoquant au mieux du mal être au travail, au pire des burns out ou des démissions. Ce n’est pas admissible ! Nous dirigeants de TPE, nous recrutons des salariés avec les compétences dont nous avons besoin pour le projet d’entreprise que nous portons, et auquel nous demandons d’adhérer en toute transparence. Et un salarié peut parfaitement dire à un moment donné, qu’il n’est plus d’accord avec le projet d’entreprise.

Tout irait bien dans le meilleur des mondes ? Les problèmes viennent souvent du décalage entre les attentes des dirigeants et des salariés vis à vis de l’entreprise.

Un dirigeant de TPE voudra faire du chiffre d’affaires, développer un produit ou un service peut-être sans avenir ou sans marché, mettre en place une organisation qui lui convient, travailler 60 heures par semaine parce qu’il aima ça, gagner beaucoup d’argent même en faisant pression sur ses salariés …

Un salarié souhaitera avoir un travail alimentaire, effectuer le nombre d’heures légal pour se consacrer à d’autres occupations, obtenir des augmentations même en périodes difficiles, se décharger de certaines responsabilités, et peut-être tout simplement avoir un bon salaire.

Un dirigeant de TPE doit accepter ces différences car même dans les entreprises de l’Économie Sociale et Solidaire, le ou les dirigeants assument seuls la charge mentale et les responsabilités.

Pour nombre de dirigeants de TPE, il est difficile de comprendre qu’un salarié n’accepte pas de faire plus d’heures pour terminer un travail, ou endosser une responsabilité ponctuelle alors que bien souvent ils compensent ces heures ou responsabilités. Combien d’entre nous effectuons le double du nombre d’heures travaillées légales, pour compenser le nombre d’heures laissées par des salariés qui respectent scrupuleusement leurs 35 heures ? Je le vois tous les jours dans mon entourage professionnel.

Le danger, c’est l’épuisement du dirigeant obligé de faire 50, 60 voire 70 heures par semaine au début par goût, puis par nécessité et enfin par contrainte, en négligeant sa vie personnelle et familiale.

Évidemment, il n’est pas question de faire travailler des salariés au delà de la durée légale du travail, ni de les faire travailler gratuitement. Je cherche juste à attirer l’attention des pouvoirs publics sur la situation précaire de nombre de dirigeants de TPE, obligés de sur-travailler jusqu’au burn-out parce ce que la conjoncture économique, la situation financière de l’entreprise ne leur permet pas de recruter.

Il y a presque une hypocrisie de l’Administration à protéger les salariés, tout en fermant les yeux sur les dirigeants de TPE qui s’épuisent à produire suffisamment pour payer les cotisations sociales et les prélèvements obligatoires de leur entreprise. Deux poids, deux mesures !

Autre exemple, savez vous que beaucoup de dirigeants de TPE ne s’autorisent pas à tomber malade par peur de voir leur entreprise péricliter ?

Il arrive aussi parfois que des salariés infligent aux dirigeants de TPE des reproches ou des attitudes sans réel fondement mais de nature à les déstabiliser. Le Code du Travail laisse une grande liberté à de tels agissements, sans que des dirigeants envisagent même de se défendre.

Le lien de subordination est évidemment un frein à la convergence des attentes entre les salariés et les dirigeants.

Je suggérerai bien aux décideurs d’envisager de considérer aux moins les dirigeants de TPE comme des contributeurs équivalent pour la richesse créée dans les entreprises, et du coup de leur accorder les mêmes droits de représentation, de défense, et de temps de travail que les salariés.

Peut-être, faudrait-il envisager d’autres formes d’implication des salariés dans les entreprises, autre que l’intéressement, pour qu’ils s’intéressent aux contraintes et aux difficultés de la gestion d’une entreprise ? Un bon dirigeant d’entreprise arrivera expliquer et communiquer ces contraintes mais rarement à impliquer plus ses salariés.

Oui, embaucher des salariés est une aventure humaine riche et passionnante qui nécessite un peu de savoir-faire et beaucoup de savoir-être.